Critique Manga Ragnagna et Moi #1

Et si on en parlait ?

Déjà, pour ce manga en particulier, signalons que le format est plus grand que d'habitude. De plus, sa couverture est superbe, le rose de Ragnagna va attirer l'oeil, et quand on y regarde de plus près, on apprécie le titre en relief sur le côté ou sur le dos, même le personnage en brillant sur l'arrière est de toute beauté. C'est un bel objet une fois en main, où tout le savoir-faire des Éditions ki-oon se reflète.

Mais pas seulement, car le sujet sort aussi de l'ordinaire : les menstruations. Et dès le début, c'est par le dessin que Ken Koyama s'exprime directement aux lecteurs pour leur faire ressentir à eux aussi des règles douloureuses. C'est le personnage de Ragnagna, qui donnera directement un coup de poing dans le ventre à en faire vomir. C'est efficace, car tout de suite on a mal pour ces dames. Et si on n'avait pas compris, le poupon rose donne d'autres frappes en différents endroits du corps pour imager la fatigue générale, ou les maux de tête suivant la personne qui subit. Pour finir, il prendra une quantité de sang directement à la seringue au bras. On le suppliera d'en laisser un peu. Franchement, c'est efficace pour créer une empathie immédiate.

Sinon, dans les futures histoires qui vont suivre, cet acte sera plus ou moins drôle, mais toujours bien narrée. J'ai été vraiment agréablement surpris, car les dessins sont assez simples, voire simplistes, mais chaque chapitre a son sens profond. L'arrivée des règles dans la vie d'une femme peut signifier bien des choses. On voit la première fois chez une jeune fille, et son désordre hormonal qui l'accompagne dans les bonus. Mais aussi, l'arrivée de Ragnagna peut être mal vécu lorsque l'on attend tant un enfant, qui ne vient décidément pas. Et quand on est célibataire, et que l'on ne souhaite pas le rester, ça peut-être frustrant aussi. Parfois, il sert même à ne pas faire de bêtise en couchant avec un homme, qui ne respecte jamais le sexe opposé. Par contre, la femme âgée lui dira aurevoir comme à une vieille amie, soulagée ou non d'ailleurs.

Et puis, ce manga ira plus loin que l'on ne pense au départ, comme nous faire revenir à l'ère Édo. La femme s'isolait à l'époque dans une hutte menstruelle, considérée comme impure à ce moment par la société. C'est dingue quand on y repense ! Mais l'autrice a raison d'y revenir. Comme cette fois où elle parle de la créatrice des serviettes hygiéniques jetables, sur le modèle européen ou américain. Apparemment, les Japonais étaient en retard à ce niveau, en se servant encore d'ustensile peu confortable comme une culotte en cuir. Ce chapitre concernant la vie de Yoshiko Sakai est formidable.

On comprend pourquoi ce manga est particulièrement bon. Il permet à tous de connaître ce sujet particulier des menstruations par des scènes didactiques, ou humoristiques, souvent tendres et attachantes. Il mérite sincèrement le prix culturel Osamu Tezuka, de 2019, tant convoité chaque année par les mangakas. Pour ma part, étant un homme, j'ai apprécié le fait que Ragnagna s'en prenne aussi à un mari. Reste à lui aussi d'effectuer les tâches ménagères maintenant qu'il a compris ! Et, un autre chapitre est aussi dans ce style, avec le changement temporaire du corps d'un jeune homme et d'une femme, un moment où l'on parle aussi du désordre psychique, chez le sujet masculin. Rien n'est épargné et c'est incroyable. Un titre nécessaire, actuel, et qui regarde aussi vers le passé. Il est d'utilité publique, je le conseille vraiment à tout le monde, même aux messieurs ! Je vous souhaite par avance une bonne lecture !