Interview Kaoru Mori au salon du livre

Découvrez l'interview de l'auteure de Bride Stories

C'est à l'occasion du salon du livre que nous avons eu la chance de rencontrer Kaoru Mori en tête à tête.
L'interview retranscrite ci-dessous a été realisée par Tori. Un grand merci à lui.


Pouvez-vous vous présenter auprès des membres de Manga Sanctuary et nous raconter un peu votre parcours ?

Kaoru Mori : Bonjour, je suis Kaoru MORI.

J'ai commencé à dessiner au lycée. Je faisais ce qu'on appelle des dōjinshi (publications amateur), et j'ai été remarquée par un recruteur de maison d'édition, qui m’a approché et m'a proposé d'être publiée dans un magazine ; c'est comme ça qu'a commencé Emma, mon premier titre, que j'ai continué pendant 10 tomes, Ensuite, après la fin d'Emma, j'ai commencé Bride stories et voilà…

 

Comment sont nés le projet Bride Stories et les principaux personnages, et pourquoi avoir fait une histoire se déroulant sur la Route de la soie ? Il n'y avait pas de maid, là-bas !

KM : Tout le monde s'inquiétait, on me demandait « Ça va, vous n'allez pas vous évanouir avant la fin ? »…

Mais je continue à dessiner des maids, hein, mais c'est juste pour moi !

En fait, après la fin d'Emma, je ne voulais pas dessiner quelque chose d'encore centré sur l'Europe et l'Angleterre, je voulais vraiment changer d'univers, et j'ai toujours été passionnée par l'Asie Centrale, c'est un thème que j'aime bien depuis mes années lycée. C'est juste que je n'avais pas pu le faire avant car c'est très complexe à dessiner, ça me prend vraiment beaucoup de temps et le magazine dans lequel je le publiais au début était bimestriel, donc ça me permettait d'avoir assez de temps pour pouvoir le faire… Bon, maintenant, il est devenu mensuel… Mais au début, j'ai pu avoir un peu plus de temps pour dessiner.

 

 

La série doit vous demander beaucoup de travail de documentation, encore plus que pour Emma (costumes, coutumes, contexte géopolitique, etc.)… Comment effectuez-vous vos recherches ?

KM : En effet, c'est beaucoup plus difficile d'avoir de la documentation que pour l'Angleterre, tout simplement parce qu’il s’agit d’une culture de tradition orale ; il y a donc beaucoup moins de choses, et les plus anciens documents qu'on peut trouver datent justement de l'arrivée des Européens et des premiers ethnologues qui sont venus et ont apporté avec eux l'alphabet et donc l'écriture, etc.

Par conséquent, pour trouver de la documentation, c'est principalement par internet. Je fais beaucoup de recherches. En général, je cherche les universitaires, les chercheurs, qui compilent des listes, font des thèses sur ce genre de choses, sur l'époque, etc. et je peux trouver grâce à internet leurs travaux, et ensuite je vais à la bibliothèque pour pouvoir les lire et les consulter.

J'utilise beaucoup bookfinder.

 

 


De nombreux passages sont sans parole… Avez-vous déjà songé à faire un manga entièrement muet ?

KM : Oui, évidemment, sans bulle, c'est beaucoup plus facile ! Si j'étais libre de dessiner à 100% ce dont j¹ai envie, ça donnerait probablement des mangas sans texte !

 

Les éditions françaises en grand format d'Emma et de Bride Stories mettent en valeur la finesse de votre trait et le détail de vos dessins. Qu'en avez-vous pensé quand on vous a présenté le projet ?

KM : « C'est vraiment grand ! »

Je me suis dit que ça ne devrait pas être facile à ranger, à la maison !

En fait, quand je dessine, les feuillets originels sont pensés pour la taille standard, du coup quand je les vois agrandis, j'ai tendance à voir les petits défauts !

 

Vos mangas présentent des personnages féminins ayant un caractère fort, dans des sociétés où la femme avait assez peu de droits. Est-ce à mettre en rapport avec la place finalement encore peu importante de la femme dans les sociétés modernes, ou bien sont-ce juste des femmes qui vous ressemblent ?

KM : C'est une question assez intéressante. J'ai l'impression que, quelles que soient les sociétés, c'est toujours la mère qui est le chef de la famille, que ce soit en Asie Centrale ou ailleurs. En général, c'est le personnage (même si ça ne se voit pas forcément) qui a le plus de pouvoir à l'intérieur de la cellule familiale. Alors est-ce que j'ai voulu présenter des personnages féminins particulièrement forts ? Je ne pense pas… Pas volontairement, en tout cas. Je ne cherche pas vraiment à ce qu'il y ait de personnages forts, féminins ou masculins, je veux juste qu'ils soient intéressants pour le lecteur, quel que soit leur sexe. Mais elles ont vraiment l'air si fortes que ça, les femmes que je dessine ?

 

Quel effet cela vous a-t-il fait de recevoir des prix en France ?

KM : J'ai été très surprise. En plus, en France !

 

Quels mangas lisiez-vous plus jeune, et quels auteurs vous ont influencée ?

KM : J'ai toujours apprécié le travail de Jirō TANIGUCHI, depuis mes plus jeunes années jusqu'à maintenant. Il y a aussi trois auteurs que j'aime beaucoup : Yōsuke TAKAHASHI, Kenji TSURUTA, Izumi TAKEMOTO, mais je pense que ce sont trois auteurs qui n'ont pas été traduits en France (note : Kenji TSURUTA a été publié en France : c'est l'auteur de Spirit of Wonder et de Forget me not… Yōsuke TAKAHASHI est l'auteur, entre autres, de Mugen shinshi, un cycle d'horreur assez connu au Japon).

Kaoru SHINTANI, aussi, l’auteur d’Area 88.

 

Est-ce la première fois que vous venez en France ? Que pensez-vous de l’intérêt que les français portent aux mangas et à la culture japonaise ?

KM : Oui, c’est la première fois.

Je pense que la France est aussi un pays de dessin, de peinture, donc je ne trouve pas ça surprenant, en fait, qu’ils soient attirés, justement : le dessin attire le dessin. Moi aussi, j'aime des dessinateurs français. La frontière ne fait pas de différence.

 

Avez-vous un message à transmettre à vos fans français ?

KM : Au Japon, il y a des enquêtes de satisfaction dans les mangas où les fans peuvent justement réagir sur ce qui se passe. Ça n’existe pas en France, mais avec un peu d’effort, si vous envoyez « On veut voir plus Pariya ! », on pourra peut-être faire quelque chose pour vous…

 

PORTRAIT CHINOIS


Un animal ?

KM : J’adore les animaux, c’est un peu difficile…Peut-être un écureuil.

 

Un élément ?

KM : L’arbre.

 

Une couleur ?

KM : Le vert.

Je m’appelle Mori (forêt, en japonais), alors l’arbre et le vert me vont bien.

 

Une ville ?

KM : Tôkyô.

 

Un genre de livre ?

KM : La documentation historique (l’histoire du verre, Les meubles du XIXe siècle, etc.)

 

Une boisson ?

KM : Le thé genmaicha (du thé au riz grillé).

 

Un genre de film ?

KM : Les films d’action

 

Une plante/fleur ?

KM : La fougère

 

Un genre musical ?

KM : La musique classique et la chanson française.

 

Nous tenons à remarcier Kaoru Mori, ainsi que Victoire, Cécile, Ahmed et Odilon qui ont rendu cette interview possible.

Source: Tori

Skeet

Créateur de Manga Sanctuary et avant tout lecteur de manga depuis la fin des années 80.
Commentaires (0)