Zoom nouveauté : Montage chez Kana

Voici une présentation complète et nos premières impressions sur la série Montage, série basée sur des faits réels : la fameuse affaire des 300 millions de yens.

 

Comme bon nombre d'entre vous le sait déjà, les deux premiers tomes du manga Montage sortent aujourd'hui en librairie aux éditions Kana.

Cette série a pour sujet l'affaire des 300 millions de yens, un crime parfait, non violent et bien sûr jamais élucidé.

Ce fait divers continue de faire rêver bon nombre de japonais qui considèrent cet évènement survenu le 10 décembre 1968 comme le casse du siècle.

 

 

 

LES FAITS REELS

 

Cette mystérieuse affaire s’est donc déroulée au Japon, le 10 décembre 1968. Alors que quatre hommes de la Nippon Trust Bank sont en train de livrer les primes de fin d’année aux employés d’une usine Toshiba, ils sont arrêtés par un motard qui a tout l’air d’un policier.

Celui-ci leur explique qu’une explosion a eu lieu au domicile d’un dirigeant de la société à laquelle ils appartiennent et qu’il est possible que leur véhicule soit piégé.

Cette explication est d’autant plus convaincante que le patron des quatre employés avait récemment reçu des menaces par courrier : le piège se met en marche.

Le faux policier ne s’arrête pas en si bon chemin et commence à faire mine de chercher une éventuelle charge explosive sous la voiture, jusqu’au moment où de la fumée commence à s’échapper. A ce moment-là, il informe les quatre autres personnes qu’il a trouvé de la dynamite et que la voiture va exploser d’un moment à l’autre !

L’instinct de survie des convoyeurs se met en marche et ils s’enfuient derechef alors que le policier lui, reste bien sûr à côté de la voiture et peut ainsi partir tranquillement avec le butin.

 


 

Suite à cet incident, une enquête est bien évidemment menée et dès le 21 décembre 1968, un portrait-robot est diffusé mais c’est un echec.

Quelques indices ont pourtant été laissés : le véhicule qui transportait l’argent a été retrouvé au niveau des ruines de la pagode de Kokubunji d’où le criminel serait parti à bord d’un autre véhicule.

De plus, un imperméable et une voiture ont été retrouvés sur un terrain vague, lieu où la fausse moto de police était stationnée.

Différents objets ont aussi été retrouvés : housse, fumigène, casquette...mais aucun n’a permis de réellement avancer dans l’enquête qui s’est révélée être un véritable échec malgré une mobilisation policière très importante et de nombreux suspects. Plus de 170 000 enquêteurs ont participé, plus 120 indices (objets divers) ont été trouvés et plus de 110 000 suspects ont été interpellés  !

Parmi ces suspects, un garçon de 19 ans, fils d’un motard de la police et chef de bande ou encore un chauffeur de 26 ans correspondant au portrait robot...mais l’un est mort empoisonné et l’autre avait un alibi qui l’a dédouané.

Sept ans plus tard, le 10 décembre 1975, il y a prescription et l’affaire est classée non élucidée. Mais depuis, l’affaire fait toujours parler et l’arrivée d’internet a contribué à perpétuer la légende.

 

 

 

UN BANDIT SYMPATHIQUE ?

 

Quand on parle de braquage, on s’imagine toujours un acte violent qui laisse des traumatismes aux victimes toute leur vie. Mais dans le cas présent cela s’est fait d’une manière totalement pacifique et c’est clairement ce qui a fait de cette histoire une légende.

Car des braquages, il y en a tous les jours mais le mode opératoire est loin d’être aussi ingénieux...Et c’est probablement pour cela que l’auteur des faits a été plus admiré que détesté.

On peut même arriver à éprouver de la sympathie pour lui alors que cela reste tout de même un voleur qui a commis un acte répréhensible. Ajoutez à cela le fait qu’il s’en soit pris à une grosse société et vous comprendrez pourquoi personne ne lui en veut réellement. S’en prendre à un riche et de manière non violente passe beaucoup mieux en général auprès de la majorité de la population !

“Mais après tout, il n’a fait de mal à personne ?” est-on en droit de se dire. Certes mais l’enquête, elle, a causé de nombreux dégâts dans la vie de certaines personnes suspectées.

 

LE MANGA : THEORIE DE DEPART

 

Montage a donc pour base cette histoire incroyable et l’auteur, Jun WATANABE, va nous proposer une des théories possibles car n’oublions pas que ce crime n’a jamais été élucidé et que bon nombre de personnes y est allé de sa supposition, ce qui a contribué à alimenter la légende pendant toutes ces années.. L’auteur part du principe que l’auteur des faits avait un garçon qui, en 2004 alors qu’il avait 10 ans, tombe par hasard sur un homme agonisant qui lui révèle que son père est l’auteur du vol des 300 millions de yens. Mais il lui dit surtout de ne faire confiance à personne.

6 ans plus tard, Yamato découvre un billet de banque tâché de sang dans les affaires de Kendo de son père disparu et celui-ci fait de suite le rapprochement avec ce que l’homme lui avait révélé. Il fait des recherches et découvre que le numéro de série du billet fait bien partie des billets volés en 1968.

A partir de ce moment-là, Yamato et Miku, son amie d’enfance avec laquelle il vit depuis la disparition de son père, vont se mettre en tête de retrouver le butin grâce à ce premier indice…





UN SCENARIO VISIBLEMENT COMPLEXE

 

Quand on s’attaque à une telle histoire qui a alimenté, et alimente toujours, le fantasme des japonais depuis presque 45 ans, la théorie se doit d’être bien ficelée et c’est visiblement le cas à la lecture des deux premiers tomes de la série.

 


© 2010 Jun Watanabe / KODANSHA

 

Déjà, la mise en scène (j’emploie volontairement un terme réservé habituellement au cinéma) est plutôt habile : le manga démarre sur une scène qui ne revient que bien plus tard dans le tome, les flashbacks ponctuent le récit et nous font découvrir la fameuse scène du vol et  la révélation du secret quand Yamato avait 10 ans.

L’auteur part du principe que si une telle affaire n’a jamais pu être élucidée, c’est que d’autres personnes n’avaient pas d’intérêt à ce qu’elle le soit. Vous l’aurez compris, c’est la théorie du complot qui semble nous être exposée.

C’est un véritable jeu de piste que nous propose l’auteur avec son lot de flics véreux et de complices en tout genre. Yamato prend vite conscience qu’il ne peut faire confiance à personne et c’est le cas du lecteur également ! On se met à suspecter chaque personnage.

 


© 2010 Jun Watanabe / KODANSHA

 

Ainsi, il est très difficile de savoir à qui se fier et quel est leur but : retrouver le butin, ne pas révéler leur rôle de complice dans l’affaire ou dans le meurtre du père de Yamato...difficile à dire  et c’est ça qui fait la force de ce manga dès les premières pages.

 

BONNE PIOCHE POUR KANA

 

En sortant les deux premiers tomes en même temps, pratique de plus en plus courante chez les éditeurs, Kana nous permet de ne pas trop rester sur notre faim.

Car il faut bien reconnaître qu’avec ce genre d’histoire, l’impatience de lire la suite est à son paroxysme.


Le premier tome pose les bases comme souvent, mais ici, l’auteur ne passe pas trop de temps à nous présenter les faits de 1968 et nous présente rapidement sa théorie ce qui est plutôt une bonne idée.

Le rythme devient rapidement soutenu et le lecteur ne peut plus décrocher grâce à de nombreux rebondissements et changements de lieux.

Le dessin est honnête sans être particulièrement exceptionnel mais a le mérite de bien coller avec l’histoire avec un trait réaliste, chose qui semblait nécessaire. Le découpage est ainsi assez classique et sobre : on est bien dans une série mature.

 

Montage est pour le moment conforme à ce qu’on attendait : un thriller haletant sur fond d’enquête policière qui promet un scénario complexe, dans le bon sens du terme.

La série étant encore en cours au Japon avec déjà 12 tomes, on peut se demander si l’auteur va réussir à faire durer le suspense aussi longtemps.

En tout cas pour le moment, Montage réalise une entrée réussie et remarquée dans le paysage du manga en France et il serait dommage de s’en priver.

 

INFOS TECHNIQUES

Titre : Montage (??????)
Année : 2010
Catégorie : Seinen
Mag. Prépub. : Young Magazine
Genres : Suspense, Policier
Mangaka : Jun WATANABE
Série terminée en 19 tomes

Skeet

Créateur de Manga Sanctuary et avant tout lecteur de manga depuis la fin des années 80.
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