Critique Manga Citrus #1

7
Citrus

par Willos le ven. 1 avril 2016

Yuzu, fille délurée, en apparence superficielle, nous sert de guide dans cette histoire.
Suite à un changement d’école, elle se retrouve dans un cadre très stricte, et rencontre pour la première fois Mei. Va alors s’en suivre une série de confrontations entre deux modes de vie et de pensée diamétralement opposés.
Le personnage de Mei est froid et distant, et même cruel au point que ses réactions la rendrait presque peu crédible, et surtout l’éloigne du lecteur malgré les interrogations quelle peut susciter. C’est sans compter sur Yuzu, qui après s’être heurtée à ce mur de pics, va gérer à sa façon cette intrusion dans son monde. La présence de cette nouvelle sœur nécessite un besoin de la découvrir au delà de sa façade rigide, mais chaque tentative se solde par une riposte qui la blesse, mais pour autant renforce sa détermination à percer de façon bienveillante la carapace de cette fille qui la rejette en tout lieu. De l’incompréhension nait un désir de compréhension. Du désir de compréhension nait un désir de possession.

Le premier chapitre attaque dans le vif du sujet, avec un rythme rapide qui m’a paru désordonné. Je n’ai pas vraiment compris ce qu’il se passait, ou plutôt pourquoi ça se passait. Un peu comme pour la protagoniste finalement.
Le second n’est pas spécialement plus clair. Je me suis vraiment demandé où l’auteur voulait nous emmener.
Ensuite ça décante pour arriver à une fin de premier tome beaucoup plus conventionnelle.
Les pages bonus, qui constituent presque un mini chapitre officieux, sont pour moi un bon aperçu des évolutions à venir ; en 7 pages est résumé simplement ce qui aurait pu s’étaler laborieusement sur un chapitre.

Le personnage d’Harumin est aussi intéressant, car elle sert de pivot à cette première partie, en faisant la transition entre la personnalité de Yuzu avec qui elle se sent proche, et l’établissement stricte dans laquelle elle connaît déjà les us et coutumes. Elle ne se cantonne pas à un rôle de présentation, et le petit clin d’œil en fin de tome est un très bon signe pour l’ouverture hors couple central dans les prochains tomes. Un bon potentiel exploitable de personnages secondaires a été placé, ce qui devrait fluidifier les futures intrigues, tout du moins leur mise en place.

Si le point de départ est un prétexte sorti ex nihilo, à prendre comme il vient sans chercher à comprendre (sinon la lecture s’arrêtera au premier chapitre), sa conséquence principale voulue est quant à elle intéressante à suivre dans ce yuri.
Cette romance sœur/belle-sœur ne pose alors pas vraiment de problème, car elle est présentée à l’inverse de la classique bravade du tabou pour le faire admettre au lecteur. En effet, elles n’ont pas de lien de parenté, ne se connaissent pas depuis longtemps, mais en ayant été présentées autrement que via le cercle familiale. Leur relation reste à construire, en jonglant entre leur rapprochement de camarade, la création d’un lien affectif fraternelle et les sentiments potentiellement amoureux qu’elles ressentent l’une pour l’autre. Le tout selon des intensités fluctuantes et une réciprocité asynchrone, dans des contextes mélangés scolaire/familiale, public/privé, et norme sociale/mœurs dissolues.

Côté graphique pas grand-chose à redire, c’est beau, c’est propre, bien que si l’on a globalement un remplissage et un placement pas mal académique, à la sauce contemporaine numérique, c’est maîtrisé et efficace.
Vous n’y ferez peut-être pas attention de prime abord, mais cette série regorge de petits détails (regards, soupirs, positions des mains, etc...) qui ajoutent à la compréhension de la psychologie des personnages, mais qui ne se remarquent qu’une fois leurs identités assimilées. Je pense que les personnages vont acquérir une singularité, une cohérence et un bon niveau de précision au fur et à mesure de la lecture, par l’affutage du regard du lecteur, et non par une construction empirique de l’auteur. Chacune d’entres elles semblent animées de sa propre âme, pleine et entière sans être standardisée ou caricaturale, accréditant une vie autonome hors champ, mais restant encore masquée derrière la narration principale, qui en progressant convertira la proximité en intimité (en tout cas je l’espère).

Paradoxalement, cette première lecture m’aura donc quelque peu déçu, vis-à-vis de l’estime qu’on lui attribuait. Je n’attendais rien de cette série, si ce n’est d’être un nouveau yuri sortant en France, qui plus est une série "longue". L’intérêt qu’elle suscite l’a précédé, altérant mon appréciation, car l’inertie de l’enthousiasme collectif sur ce titre et son annonce, a surpassé la simple joie de découvrir un (bon) nouveau yuri. Mais je compte bien savourer le tome 2 comme il se doit, car c’est indubitablement sur la durée que le charme opérera.

En bref

7
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