Critique Manga Le Mandala de Feu

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Le Mandala de Feu

par Tampopo24 le mar. 22 juin 2021 Staff

Le feu de la passion

Avec Le Mandala de Feu, je découvre un tout nouvel éditeur sur le marché du manga français : Mangetsu (branche manga de Bragelonne), un jeune éditeur assez ambitieux. A côté de titres tout à fait mainstream, comme Ao Ashi (sur le foot), il a tout de même fait le choix audacieux de titres plus intimistes comme Le Mandala de Feu, qui retrace la vie d'un célèbre peintre japonais du XVIe siècle. 

L'autrice, Chie Shimomoto officie depuis les années 2010 sur des titres historiques qu'elle publie dans des magazines seinen. Elle n'en est donc pas à son premier coup d'essai quand elle sort Le Mandala de Feu en 2016 dans le Comic Ran Twins - Sengoku Bushou Retsuden (de Leed Publishing), magazine spécialisé dans les titres historiques, que je découvre ici. 


Le Mandala de Feu est un court oneshot dédié à la figure historique de Tohaku Hasegawa, un peintre ayant vécu au Japon entre 1539 et 1610, dont l'autrice retrace le parcours depuis la mort de Nobunaga jusqu'à sa propre mort. Je ne connaissais pas l'artiste avant de commencer, en revanche, lisant Le Chef de Nobunaga d'autres figures ne m'étaient pas inconnues et j'ai été ravie de les recroiser ici, dans un titre qui se veut assez fidèle historiquement parlant.

Le oneshot s'étalant sur une période de vie assez longue du peintre a dû faire des choix et le premier d'entre eux fut de donner une teinte passionnée au récit comme l'indique le titre : Le Mandala de Feu. En effet, la narration et le rythme, tout comme le héros furent tout feu tout flamme. Le récit avance très vite, est plein de fougue et de passion, et ne laisse pas de temps mort. J'ai beaucoup aimé et en même temps, j'ai été frustrée par ce tempo trop rapide. L'autrice ne laisse pas le temps de se décanter aux différentes phases que vit Tohaku. Ça va trop vite et ça manque un peu d'impact. Avec un tome ou deux de plus, cela aurait été bien mieux pour creuser tout ce qu'il y avait d'intéressant dans ce titre.

En effet, il regorge de thèmes que je juge passionnant. Il y a d'abord le rapport de l'artiste à son oeuvre, ses influences et ses contemporains peintres ; celui de l'artiste à son mécène commanditaire ; celui à sa famille et aux membres de son studio. Il y a également la question de l'époque agitée à laquelle il vit. Le titre démarre quand même par le suicide de Nobunaga et l'incendie de son château à Azuki. On rencontre ensuite le grand maître du thé Soeki et on croise le grand peintre Eitoku Kanô, ainsi que le shogun Hideyoshi qui pris la suite de Nobunaga. Et il y aurait énormément à dire sur leur oeuvre à chacun. 

Mais l'autrice a fait le choix de nous faire partager la passion de Tohaku avant tout. On vit la révélation qu'il connait d'abord face à l'oeuvre d'Eitoku, qui le fait passer de peintre médiocre à peintre reconnu. On le suit ensuite dans son ascension aussi bien sociale qu'intérieure et c'est cette dernière qui est la plus riche. Pour nous accompagner, l'autrice a glissé plusieurs références plus vraies que nature des oeuvres produites par le peintre. Elle nous transmet ainsi tout son génie et sa passion, mais aussi les difficultés rencontrées pour en arriver là et les problèmes occasionnés par cette passion débordante. La vie d'artiste, c'est quand même assez particulier. 

Le titre regorge de passages très philosophiques, avis aux amateurs, ce qui n'est pas forcément mon cas, car je trouve que cela détonne avec le caractère très vif de la narration et le côté un peu immature (presque comme dans un shonen, je ne sais comment le dire autrement, alors faute de mieux...) du héros. Cela crée un décalage marquant. 


Les dessins sont de cet apanage, entre douce finesse et ardeur brûlante pleine de vivacité. J'ai adoré les passages où on plonge littéralement dans l'art de l'époque comme s'il était vivant. Le rendu des intérieurs de palais et autres ateliers d'artistes sont riches en détails. Les personnages sont très expressifs, parfois même un peu trop, car il y a chez elle un goût pour l'exagération proche du théâtre kabuki lors de certains passages. Elle n'hésite pas non plus à se montrer bien rude, lors des événements historiques clés qui émaillent le récit (suicides, incendies, morts...). C'est vraiment une autrice agréable à suivre sur un titre historique. 

Je terminerai par un petit mot sur l'édition. J'ai été surprise par la légèreté et la souplesse de la reliure, que je ne crois pas avoir trouvé ailleurs, sauf erreur de ma part. A voir comme cela vieilli, car si j'ai éprouvé un vrai confort de lecture, je trouve la qualité un peu légère... Mais j'ai cru entendre que ce n'était que sur ce titre et que les autres parutions de l'éditeur étaient dans la norme.

En bref

Avec ce premier titre qui arrive chez nous, Mangetsu frappe fort pour moi. Il offre un oneshot, certes non dénués de défauts propres au genre, mais surtout très prometteur et bien ficelé qui met en avant une autrice dont j'aimerais lire les autres séries historiques. En proposant une oeuvre culturelle sur un peintre trop méconnu chez nous, il participe à notre enrichissement personnel. Pour ma part, étant en plein dans cette période historique dans mes lectures de manga, j'en fus ravie ! (A lire avec Le Tigre des Neiges et Le Chef de Nobunaga)

7
Le Mandala de Feu
Positif

Un cadre historique précis et intéressant

Un héros tout feu tout flamme

La passion à l'état brut

Une plongée dans l'art et l'histoire de l'époque

Des dessins beaux, variés et immersifs

Negatif

Une narration trop rapide, le titre aurait mérité plus de pages/tomes

Une tendance à la théâtralisation exagérée

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