Critique Manga Sayuri

9
Sayuri

par MassLunar le jeu. 14 janv. 2021 Staff

Esprit de famille

Après son hommage autobiographique à travers sa passion au rétro-gaming ( Bip-bip Boy), sa comédie un zeste romantique et surtout compétitive autour des bornes d'arcades (Hi score-girl) ou encore un détour par le survival punitif très hardcore (Le Perce-Neige), voici un nouveau titre de l'atypique Rensuke Oshikiri au style si particulier avec un petit bijou fantastique : Sayuri.

Les éditions Omaké (mais qu'est qu'ils sont chouette ces gens) nous éditent un nouveau titre remarquable avec un one-shot qui n'a rien à envier au cinéma de genre japonais. J'évoque par là les fameux Ring, Ju-on et autres petits bijoux de Takashi Shimizu ou Kiyoshi Kurosawa... Rensuke Oshikiri dans une agréable inspiration cinématographique nous conte sa propre vision d'une maison hantée par un esprit retors et absolument sans pitié.

Le postulat de la maison hanté n'est pas une nouveauté dans la culture. Toutefois, il est toujours bon de souligner l'appropriation de ce thème dans le domaine du manga que, personnellement, je trouve peu courant. Dans tous les cas, Sayuri fait désormais partie des titres de références dans le domaine du manga fantastique. Avec la radicalité dont il a notamment fait preuve sur Le Perce-neige, Rensuke Oshikiri plonge son lecteur dans une atmosphère oppressante qui s'ouvre sur un brutal décès. Sayuri, c'est d'abord l'effondrement d'une famille : une tragédie de l'intime dans laquelle l'horreur vient bousculer le confort et la joie d'une cellule familiale qui ne devient alors qu'une cellule maudite entre les murs d'une maison sinistre.

Oshikiri-san exploite parfaitement le cadre de cette maison hanté. L'auteur joue étroitement avec les différents degrés de plan ne dévoilant jamais une pièce. Son découpage est souvent resserré et peu de plans d'ensemble viennent englober cette maison. Nous sommes vraiment coincés avec cette famille dans les couloirs ténébreux de cette demeure. L'horreur est progressive et le mangaka va de plus en plus accentuer les encrages au rythme d'une confrontation cauchemardesque face à l'esprit. 

Le style de Rensuke Oshikiri n'est pas simple à saisir au premier abord. Il a un style un peu grimaçant ( que je trouve tout de même plutôt sobre par rapport à ses autres titres comme Bip-Bip Boy ). La silhouette et les traits de ses personnages possèdent un style très particulier, parfois un peu grossier avec la forme accentué de leurs visages, les yeux écartés... Mais c'est ce qui fait le charme du style de dessin de ce mangaka parce que c'est un style qui se marrie aussi bien avec la dérision et l'humour qu'avec l'horreur ou le drame. Ce style s'accorde parfaitement au ton du manga. 

En l'occurrence, dans Sayuri, l'auteur va même plus loin puisqu'il joue énormément avec des expressions de frayeur, avec de véritables masques d'horreur façon The Ring. Ce qui donne lieu à des scènes bien flippantes dans lequel le malaise règne en maître. On peut parler de l'esprit mais les humains ne sont pas en reste en terme de flippe comme en témoigne l'un des personnages de la famille que je ne spoilerais pas ici. Toujours est t-il que si Sayuri s'impose facilement comme un super manga du genre, c'est justement par rapport à ce rapport de confrontation entre les humains et l'esprit. Je n'en dirais pas plus mais disons que la dernière partie se montre assez audacieuse dans cette confrontation. Côté scénario, Rensuke Oshikiri se montre radical mais en même temps, il nous conte à sa manière l'esprit de famille et l'importance de continuer à vivre, d'avoir cette "rage de vivre " d'où le sentiment de bravoure et de volonté qui surgit de la pénombre de cette maison hantée. 

Ce manga fut un régal à la lecture. A lire sous la couette en PLS, c'est juste un très bon titre du genre dans lequel le style si particulier de l'auteur se marie très bien avec le cadre de la maison hantée. C'est le manga d'horreur/fantastique de cette année 2020.

En bref

Petit coup de coeur, Sayuri nous plonge dans les recoins d'une maison hantée et de l'effondrement cauchemardesque d'une malheureuse famille. S'inspirant du cinéma fantastique nippon, Rensuke Oshikiri signe un one-shot oppressant, radical et angoissant qui n'éclipse pourtant pas une certaine forme de bravoure.

9
Sayuri
Positif

Une maitrise esthétique de l'horreur et du cadre

Le style marquée de Rensuke Oshikiri qui oscille entre horreur des visages et climat pesant.

Une intrigue en deux temps plutôt bien maîtrisée

Une intrigue parfois radicale et dure mais néanmoins porteuse de certaines valeurs

Negatif

Se familiariser avec le style de Rensuke Oshikiri

Sayuri, forcément un nouveau calque de Sadako...

MassLunar Suivre MassLunar Toutes ses critiques (530)
Partager :
Commentaires sur cette critique (0)
Laissez un commentaire